INAPTITUDE : INVOQUER FAITS PRESCRITS C'EST POSSIBLE

INAPTITUDE : INVOQUER FAITS PRESCRITS POUR CONTESTER SON LICENCIEMENT, C’EST POSSIBLE !

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a jugé que des manquements de l’employeur à son obligation de sécurité peuvent être invoqués par le salarié pour contester son licenciement pour inaptitude, même si les faits invoqués sont prescrits (Cass. soc., 24 avril 2024 n°22-19.401). 

En l’espèce, une salariée en arrêt de travail depuis le 20 février 2013 avait été déclarée inapte à son poste à l’issue de deux visites de reprise, et avait été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 23 décembre 2015. 

La salariée a saisi le juge prud’homal le 18 mai 2016, en lui demandant notamment de reconnaître que son inaptitude résultait directement d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, et que son licenciement était donc sans cause réelle et sérieuse (cf. Cass. soc., 3 mai 2018, n°16-26.850). 

La cour d’appel d’Aix-en-Provence a rejeté la demande de la salariée, jugeant que les faits dont elle se prévalait étaient prescrits depuis le 20 février 2015.

Pour rendre sa décision, la cour d’appel s’était fondée sur l’article L. 1471-1 du code du travail, en vertu duquel toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit. Pour les juges du fond, le délai de prescription commençait à courir à partir de l’arrêt de travail.

La salariée s’est pourvue en cassation, soutenant que son action n’était pas prescrite, et ce, pour deux raisons :  

  • d’une part, elle affirmait que le délai de prescription de deux ans ne pouvait courir qu’à partir de la déclaration d’inaptitude, date à laquelle elle avait eu connaissance des incidences des agissements de l’employeur sur sa santé ; 
  • d’autre part, elle soutenait que le délai de prescription de son action portant sur la rupture du contrat de travail débutait à la date du licenciement, et non à la date de l’arrêt de travail. 

La Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel, donnant raison à la salariée sur son second moyen. 

En effet, la Cour a reconnu que la salariée avait bien eu connaissance des manquements à l’obligation de sécurité de l’employeur à partir de son arrêt de travail. 

Néanmoins, elle a jugé que le salarié qui conteste son licenciement pour inaptitude dans le délai imparti est recevable à invoquer le moyen selon lequel cette inaptitude est la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, peu important que les faits constitutifs de ce manquement soient quant à eux prescrits. 

En conclusion : ce n’est pas parce que les manquements de l’employeur sont anciens et prescrits qu’ils ne pourront pas être utilisés pour faire reconnaître un manquement à l’obligation de sécurité. 

caravage-avocats.com

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