Pour rappel, avant le 1er janvier 2017, l’avis du médecin du travail dans sa globalité pouvait faire l’objet d’un recours devant l’inspection du travail dans un délai de 2 mois.
Depuis le 1er janvier 2017 et la réforme opérée par la loi Travail, seuls les éléments de nature médicale justifiant l’avis et/ou les propositions du médecin du travail peuvent être contestés par l’employeur ou le salarié par voie de saisine, dans un délai de 15 jours, de la formation de référé du conseil de prud’hommes, laquelle désigne un médecin-expert près la cour d’appel.
Face aux nombreuses critiques, le Gouvernement a tenté d’apporter à cette nouvelle procédure par décret du 10 mai 2017, entré en vigueur le 12 mai 2017, quelques précisions sur les règles de procédure applicables :
– le conseil de prud’hommes est saisi en la forme des référés, c’est-à-dire qu’il statue dans les conditions d’un référé mais statue au fond en rendant une ordonnance ayant autorité de la chose jugée.
– le conseil de prud’hommes peut, conformément à l’article L. 4624-7 du Code du travail, charger le médecin inspecteur du travail d’une consultation relative à la contestation de l’avis du médecin du travail, mais il ne s’agit pas d’une alternative à la procédure de désignation d’un médecin expert : la consultation du médecin inspecteur du travail ne pourra servir qu’à éclairer la décision du médecin expert et ne s’y substitue pas.
– le médecin du travail (dont l’avis est contesté) est informé par la partie qui exerce le recours mais n’est pas partie au litige (art.R.4624-45 modifié du Code du travail), qui oppose seulement l’employeur et le salarié. Ainsi, lorsque l’article L. 4624-7 du Code du travail prévoit que la formation de référé peut décider de ne pas mettre les frais d’expertise « à la charge la partie perdante », cela signifie que le conseil de prud’hommes pourra décider de mettre les frais d’expertise à la charge du salarié ou inversement de l’employeur.
– le médecin du travail peut être entendu par le médecin expert désigné pour se prononcer sur l’avis médical (art. R. 4624-45 modifié du Code du travail), alors que l’article L. 4624-7 du Code du travail prévoyait seulement que le médecin expert pouvait demander au médecin du travail communication du dossier médical en santé au travail du salarié.
– sans revenir sur le caractère payant d’une procédure qui était jusque là gratuite, le décret du 10 mai 2017 apporte des précision sur les modalités de paiement des frais d’expertise, qui donnent lieu au versement d’une provision consigné à la Caisse des dépôts et consignations. La rémunération finale du médecin expert sera fixée par le Président de la formation de référé.
– la décision de la formation de référé se substitue aux éléments de nature médicale qui ont justifié les avais, propositions, conclusions écrites ou indications du médecin du travail faisant l’objet du recours (art. R. 4624-45 modifié du Code du travail). Autrement dit, le conseil statue sur le recours au vu des conclusions du médecin expert : il peut donc annuler ou préciser un avis médical. Par exemple, annuler un avis d’inaptitude physique pour le remplacer par un avis d’aptitude assorti de réserves.
C’en est donc fini de la compétence du juge administratif.
Malgré ces précisions, la nouvelle procédure reste décriée, principalement parce qu’elle est désormais payante et parce qu’aucun délai n’est imparti au médecin expert pour rendre ses conclusions, ce qui est source d’insécurité juridique pour l’employeur comme pour le salarié.
Les partenaires sociaux, réunis au sein d’un Conseil de la prud’homie le 28 mars 2017, ont considéré à l’unanimité que ces ajustements réglementaires ne répondaient pas aux difficultés générées par cette nouvelle procédure et ont demandé une mise à plat totale de cette procédure.
Affaire à suivre donc après les élections législatives.
Laura Bertrand, Avocat à la cour
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