Dans un arrêt récent (Cass. soc., 17 janvier 2024, n° 22-20.778), la Cour de cassation a rappelé que si la décision administrative définitive d’autorisation de licenciement pour motif économique d’un salarié protégé s’impose au juge judiciaire, ce dernier n’en reste pas moins compétent pour apprécier les fautes commises par l’employeur pendant la période antérieure au licenciement.
En l’espèce, un salarié qui occupait les fonctions de responsable développement marché avait été désigné représentant de section syndicale pour la seconde fois en 2017.
Après autorisation de l’inspecteur du travail du 15 février 2018, le salarié avait été licencié pour motif économique.
Le salarié avait saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes en paiement au titre de la discrimination syndicale qu’il estimait avoir subi, et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La Cour d’appel de Versailles avait jugé le licenciement nul et avait condamné la société à payer au salarié des dommages-intérêts pour le préjudice moral résultant de la discrimination syndicale.
La société a formé un pourvoi en cassation.
Elle reprochait notamment aux juges du fonds d’avoir violé le principe de séparation des pouvoirs, dans la mesure où l’autorisation administrative de licenciement établissait que celui-là n’avait eu ni pour objet, ni pour effet, de faire échec au mandat représentatif.
La Cour de cassation casse et annule la décision des juges du fond, mais seulement en ce qu’ils ont dit le licenciement nul, rappelant ainsi l’articulation des juridictions administrative et judiciaire en la matière :
- le juge judiciaire ne peut apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement du salarié protégé si l’employeur a reçu l’autorisation administrative de licencier ;
- le juge judiciaire reste cependant compétent pour apprécier les fautes commises par l’employeur pendant la période antérieure au licenciement, et notamment l’existence d’une discrimination syndicale dans le déroulement de la carrière du salarié.
Les employeurs sont ainsi appelés à la vigilance : l’obtention de l’autorisation administrative de licenciement d’un salarié protégé ne signifie pas que l’employeur est exempté de démontrer que ses agissements étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, lorsque le salarié présente des éléments laissant supposer l’existence d’une discrimination syndicale.