LE HARCÉLEMENT MORAL EST POSSIBLE MÊME ENTRE PERSONNES D’ENTREPRISES DIFFÉRENTES

Par un arrêt du 9 mai 2019 (Cass. Crim. 09.05.2019 : n°18-83510), la Cour de cassation a reconnu que des agissements de harcèlement moral pouvaient avoir eu lieu et être sanctionnés, entre deux personnes qui partageaient un bureau mais ne faisaient pas partie du personnel de la même entreprise.

En l’espèce, il s’agissait d’une présidente d’association d’aide aux familles de gendarmes qui s’est rendue fautive de harcèlement moral contre un commandant de compagnie de gendarmerie, compagnie dans laquelle la présidente de l’association disposait d’un bureau.

Cette présidente était entrée en conflit avec le commandant de la compagnie et n’avait ensuite eu de cesse de se plaindre de lui, adressant de nombreux courriers aux supérieurs de l’intéressé et le dénigrant auprès de ses subordonnés.

Confronté pendant deux ans à des récriminations incessantes, tenu de se justifier auprès de ses supérieurs, le commandant de la compagnie avait dû faire l’objet d’un suivi pour un état anxiodépressif.

Pour mettre fin au conflit, son employeur lui avait finalement proposé une « mutation ».

L’officier de gendarmerie avait ensuite déposé plainte auprès du procureur de la République pour harcèlement moral.

La question qui se posait était de savoir s’il était possible de condamner pour harcèlement moral une personne non liée par un contrat de travail au service concerné, service dans lequel travail la victime.

Dans l’arrêt du 7 mai 2019, la chambre criminelle de la Cour de cassation a répondu par l’affirmative et a condamné la présidente de l’association pour harcèlement moral.

Pour les juges, par ses propos et son comportement, l’intéressé avait provoqué une dégradation des conditions de travail du commandant de la compagnie, laquelle avait porté atteinte à ses droits et à sa dignité, altéré sa santé physique ou mentale et compromis son avenir professionnel (art. 222-33-2 du Code pénal).

Cette décision est une première car la chambre criminelle avait précédemment refusé de se placer sur le terrain du harcèlement moral pour régler un conflit entre un médecin et un psychologue qui partageaient les mêmes locaux professionnels, en raison, justement, de l’absence de relation de travail entre les deux professionnels de santé (Cass. crim. 13.12.2016, n° 16-81253).

Toutefois, en l’espèce, la présidente de l’association ne faisait pas que côtoyer le commandant de gendarmerie ; elle était considérée comme un prestataire de service présent de manière habituelle sur le lieu de travail.

Ainsi, on peut désormais s’interroger du cas de situations comparables en entreprise, avec des actes de harcèlement commis par un prestataire de services ou un consultant.

Jusqu’à présent, la chambre sociale de la Cour de cassation règle la question en mettant en cause la responsabilité de l’employeur : les salariés victimes d’actes de harcèlement moral commis par une tierce personne qui exercent une autorité sur eux, par exemple un prestataire, peuvent agir contre l’employeur devant le conseil de prud’hommes (Cass. soc. 1er mars 2011, n° 09-69616).

 

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